Remise du Grand Prix des Lectrices Elle : la 50e

Lundi 3 juin, c’était enfin le D-DAY : non, il ne s’agit pas des 75 ans du Débarquement, mais du fameux jour de la remise du Grand Prix des Lectrices Elle, mouture 2019. L’aboutissement du « travail » des 120 jurées pendant 8 mois. Il était absolument hors de question, pour moi, de ne pas y aller. Cette année, c’était en outre une date anniversaire : la 50e remise des prix. Raison de plus. En candidatant, je l’ignorais.
Ce fut donc une journée encore plus spéciale, puisqu’elle s’est déroulée en deux temps : une première partie de 15h à 18h, accessible au public sur inscription, qui célébrait à la fois la littérature et l’esprit ELLE dans ce domaine. Olivia de Lamberterie, qui présidait l’événement, y a fêté sa majorité : ses 18 ans à Elle, où elle est aujourd’hui rédactrice en chef de la rubrique littérature.
Les jurées avaient donc rendez-vous au magnifique théâtre de l’Odéon pour ce jour de fête.
(ok, j’ai pas pensé à faire une photo du théâtre de l’extérieur ! 🙂 )

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C’était aussi un double jour de chance : le ciel menaçait. Je pose un pied sur le parvis, je me retourne et il tombe des cordes. 🙂 Je regarde autour de moi : déjà pas mal de monde. Comment repérer les autres ? Certaines avaient des codes vestimentaires. J’avais filé le motif de ma robe à quelques-unes au dernier moment. J’ai aussi cherché une paire baskets roses. 🙂 J’ai jeté un oeil voir si je reconnaissais certaines, d’après leur photo de profil. C’était pas évident. Mais le hasard fait bien les choses : j’adresse la parole à la première personne à côté de moi et lui demande si elle est jurée. Réponse oui. On s’échange nos noms et on éclate de rire ! C’est parti !
On nous distribue des badges pour nous identifier comme jurées et on rejoint la salle-écrin du théâtre.20190603_195819.jpg

La première invitée était Amélie Nothomb, pour un master class.
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J’ai lu quasiment toute son oeuvre, je connais un bon nombre de ses rituels d’écrivain. Outre boire du thé noir très fort (avant de se mettre à l’écriture) et du champagne, elle dort peu, et de moins en moins précise-t-elle. Le jour où elle sera proche de la mort, elle en sera sans doute à 1h par nuit, ironise-t-elle ! On sait tous qu’elle a son bureau dans les locaux chez Albin Michel. Elle ajoute que c’est un vrai capharnaüm. Régulièrement, un bruit sourd retentit dans la maison d’édition : ce sont les piles entassées dans son bureau qui s’écroulent. De quoi décomplexer tous les bordéliques du monde ! 🙂 Certes, elle publie un livre par an (mais en écrit plusieurs en une année). On a appris qu’Albin Michel n’a pas voulu publier un de ses livres en 2014 et qu’elle en a proposé un autre. Ce n’est pas quelque chose qui la choque.

Thibault de Montalembert nous a ensuite lu un chapitre de Lambeaux, de Charles Juliet.

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Puis, Olivia de Lamberterie a fait venir sur scène une figure emblématique du journal : Jacqueline Duhême, 91 ans, où elle a exercé comme dessinatrice.

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Elle nous a raconté son parcours, assez incroyable et les rencontres qui ont changé sa vie. Comme celle avec Eluard, dont la liaison qu’elle a entretenue avec lui était vue d’un mauvais oeil par Elsa Triolet, Aragon, le bastion littéraire communiste. Elle est l’illustratrice de Tistou les Pouces Verts et auteure de nombreux livres dont Une vie de crobards (Gallimard Jeunesse, 2014). J’avoue, je ne connaît pas du tout. L’occasion d’en savoir plus.

L’invitée suivante était Delphine de Vigan, mais les jurées n’ont pas pu assister à la rencontre puisque nous devions rejoindre les lauréats du Grand Prix des Lectrices au deuxième étage du théâtre (dont les noms étaient encore tenus secrets du grand public), pour des tables rondes et dédicaces. Et c’est à ce moment-là qu’on a pu vraiment s’identifier et discuter entre nous, mais c’était court. En tout cas, on était très heureuses de se retrouver en chair et en os (les limites des réseaux sociaux c’est bien qu’il manque le contact humain !). Un verre de jus de fruit en main, avec un petit biscuit, et nous nous sommes assises au hasard autour des tables où nous ont rejoint à tour de rôle Franck Bouysse (auteur de Né d’aucune femme) , Adeline Dieudonné (La vraie vie) et Alex Marzano-Lesnevich (L’empreinte). Il manquait Jesmyn Ward (Le chant des revenants), qui n’avait pas pu venir, mais son éditrice, Caroline de Ast (Belfond) était présente pour d’éventuelles questions.

Le temps a filé trop vite. 1h30. Le temps de s’installer, que la discussion démarre, que les questions viennent, il fallait déjà repartir car le timing était serré.

La table ronde avec Franck Bouysse a tourné en partie autour de la catégorie dans laquelle a été classé son livre. Certes, ce n’est pas un polar, mais c’est un roman noir. Et puis, finalement, quelle importance ? Il avoue lui-même que depuis le début, on le classe dans ce genre alors qu’il ne lit pas de polar. Mais bon, je dirai que les genres littéraire évoluent (c’est l’histoire de la littérature) et les frontières ne sont pas fermées. J’ai adoré ce livre, c’est l’un de mes coups de coeur : j’ai été scotchée par la plume de l’auteur, dont la noirceur fait pourtant jaillir une étincelante beauté, quelque chose de lumineux, comme l’a soulignée une co-jurée ; son personnage féminin, Rose, est une femme forte.
Franck Bouysse a également expliqué qu’il attache une grande importance à l’objet livre. Il fallait que la photo de la couverture soit Rose. La photo qui la représente est l’oeuvre d’une photographe tchèque, Sara Saukova.

Adeline Dieudonnée a expliqué qu’elle écrit en écoutant du Metal (ok, je comprends mieux la fin du roman, que j’ai trouvé super gore). Elle explique que le Metal est une musique où il y a quelque chose à la fois de noir et lumineux. Je n’y connais rien à ce genre, qui n’est pas ma musique de prédilection. J’ai aimé sa plume originale, mais finalement au fur et à mesure, dans ma lecture, tout est retombé comme un soufflé, et j’ai trouvé la fin bien trop sanguinolente à mon goût, même si je reconnais qu’elle a un vrai talent de conteuse. Ce n’était donc pas du tout mon roman préféré, mais pas non plus un livre que j’ai absolument détesté puisque je lui ai mis 13/20.

Alex Marzano m’a beaucoup touchée. Il émane d’elle quelque chose d’à la fois puissant, fragile et gracieux. L’empreinte est aussi un livre qui mélange les genres (voir ma chronique). La personne qui faisait la traduction, travaille chez Sonatine et suite à une question a expliqué le titre français choisi. Le titre original est The fact of a Body, a murder and a Memoir . En résumé, le mélange de genre est courant aux Etats-Unis, mais pas encore en France. Alex Marzano a expliqué qu’au fil de sa rédaction, elle s’est aperçue qu’elle avait rédigé son livre comme une plaidoirie. Elle n’est pas avocate (malgré ses études de droit pour le devenir), mais enseigne la littérature à l’université de Portland. En lisant ce livre, classé dans la catégorie « Document », j’ai admiré le courage de cette jeune femme (voir ma chronique). Pourtant, ce n’est pas le livre, dans cette catégorie, que j’avais préféré, parce qu’il y avait beaucoup de redites et que ça avait un peu plombé ma lecture. L’aspect « plaidoirie » ne m’est pas venu à l’esprit. Cela dit, ce ne fut pas non plus un livre que j’ai détesté (12/20).
Je n’ai pas eu le temps de me faire dédicacer les livres, pas assez rapide, beaucoup de monde dans un lieu pas très grand. 😦 . Mais ce n’est pas grave du tout.
On a redescendu les marches, en bas desquelles nous attendait des photographes pour la traditionnelle « photo de famille » que vous pouvez retrouver ici avec les autres photos de la soirée, mais où ne figurent pas les jurées. On est toutes radieuses, non ? 🙂

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Crédit photo FRANCESCA MANTOVANI

Un break d’une heure et nous sommes revenues pour la fameuse soirée de remise des prix et révélation officiel des lauréats de cette cuvée de demi-siècle !

La surprise fut la présence de nombreux lauréats des années précédentes. J’ai reconnu, en vrac, Caryl Ferey, Olivier Norek, Véronique Ovaldé, Anne-Marie Revol, Kenzié Mourad, Philippe Claudel, Leila Silmani, Ian Manook….

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Après avoir cité tous les lauréats des années précédentes, depuis la création du Prix, voici venu le moment de révéler devant le tout-Paris littéraire et journalistique dans cette soirée privée, les noms des lauréats 2019.
Sont donc nominés :

Catégorie roman : surprise pas 1 mais 2 livres sortis ex-aequo : Le chant des revenants de Jesmyn Ward ;(éd. Belfond) ; La vraie vie d’Adeline Dieudonné (éd. L’Iconoclaste)

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Adeline Dieudonné

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Caroline Ast, éditrice de Jesmyn Ward

Catégorie Policier : Né d’aucune femme, de Franck Bouysse (La manufacture de livres)

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Catégorie document : L’empreinte, d’Alex Marzano-Lesnevich (éd. Sonatine)

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J’avais dit que je risquais de me rouler par terre si Le chant des revenants ne sortait pas primé ! Ce ne sera donc pas le cas ! 🙂 Pour moi ce livre confère au chef-d’oeuvre (je lui ai mis 20/20).
Je vois également mon deuxième coup de coeur, Né d’aucune femme sortir vainqueur (20/20 aussi).
Je suis donc très satisfaite !
Pour le document, j’avais classé n° 1 : Pirate N° 7 d’Elise Arfi, qui m’a scotchée (19/20).
J’aurais bien aimé connaître ceux qui ont été classés n°2 . Je verrai bien Asta de Jon Kalman Stefansson pour la catégorie roman (je lui avais mis 19/20).
Mon trio gagnant est cité dans la chronique sur L’empreinte.

Nous avons même eu droit à un mini-concert surprise, avec la présence de Vincent Delerm, invité à l’occasion de cette 50e.

Le temps a filé à une allure folle. Je savais qu’il serait à peu près impossible de discuter avec des auteurs dans le cocktail organisé après. Il y a des occasions plus tranquilles dans d’autres lieux. J’aurais voulu rester encore pour discuter avec les autre jurées qui m’ont tenu compagnie, mais le lendemain était un jour de travail. Donc je me suis éclipsée car la téléportation n’existe pas encore. J’ai repris mon train dans l’autre sens et retrouvé un tout autre monde.
J’ai passé une excellente journée, j’ai été vraiment ravie de rencontrer les autres jurées présentes, blogueuses ou pas, avant tout grandes lectrices, de discuter littérature. Je n’ai pas pu parler à tout le monde, c’était compliqué. Mais ce ne sont pas les occasions qui manquent.
Vendredi est sortie un 5 pages dans Elle sur les lauréats et le choix des jurées. La photo de famille n’y figure pas mais il y a un bel éloge du choix des jurées.
Une page se tourne. Place aux jurées de la cuvée 2020. Je n’ai pas le droit de candidater de nouveau avant 3 ans. C’était ma 2e fois. Je ne sais pas aujourd’hui si je retenterai l’aventure une troisième fois. J’aimerais aussi essayer l’aventure pour d’autres prix littéraires.

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50e Prix : le sérum anti-âge m’a fait rire. 😉

A propos Maeve

Blogueuse littéraire depuis 2009, lectrice compulsive depuis l'âge de 6 ans ^_^ .
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