Jours d’hiver – Bernad MacLaverty

4191bHZL0mL

Traduit par Cyrielle  Ayakatiskas

Gerry et Stella, originaires d’Irlande du Nord, vivant à Glasgow partent quelques jours se reposer à Amsterdam. Gerry et Stella ne sont pas de jeunes tourtereaux mais des personnes âgées, un couple qui semble vivre ensemble depuis toujours. Ils ont un fils adulte qui vit au Canada, ils sont grand-parents.

Stella est croyante, catholique. Gerry ne croit pas et a penchant pour l’alcool, même un sérieux problème. Mais ne voyez pas en lui l’ivrogne qui frappe sa femme, ni qui part en cacahuète dès qu’il a un coup dans le nez. Il veille sur Stella, s’inquiète dès qu’il la perd des yeux. Filer à l’anglaise, c’est souvent ce que va faire Stella pendant ce séjour dans la capitale néerlandaise, où Bernard MacLaverty nous plonge dans l’intimité de ce couple âgé.  Un voyage de couple ou un voyage de deux âmes seules ? Sortir de leur routine, de leur décor va-t-il rapprocher Gerry et Stella qui vivent comme deux vieux potes ? Le voyage va-t-il, au contraire, creuser le fossé et tuer le couple ?

On va suivre les personnages à travers les rues encombrées d’Amsterdam et sourire de leurs agacements. Gerry visitant le Rikjsmuseum c’est quelque chose !

« La technique de Gerry consistait à parcourir les galeries en tournant systématiquement à gauche jusqu’à ce qu’il ait visité toutes les salles. Au début, ils marchèrent ensemble. Mais parfois Gerry dédaignait des murs entiers de tableaux, leur accordant à peine un coup d’oeil, et Stella lui emboîtant le pas en se demandant pourquoi il faisait cela.
« Des bourgeois imbus d’eux-mêmes, déclara-t-il. Les natures mortes hollandaises… des tableaux de légumes qui ressemblent à des visages.« 

Bernard MacLaverty prend son temps, s’attarde aux détails minuscules qui n’ont rien d’anodin, avant de dévoiler le drame qu’ont dû affronter Stella et Gerry. Le jardin secret de chacun d’eux. On n’est pas vraiment dans une histoire feel good.

Chaque détail est l’occasion pour les personnages de s’échapper en rêveries, et de nous faire basculer, nous, lecteurs, dans une autre dimension spatio-temporelle. Sans transition. C’est un peu perturbant au début mais c’est par ce jeu de décalage, de clair et d’obscur, de divagations mentales que sera mis en lumière le drame.

L’auteur mêle adroitement l’histoire nord-irlandaise à l’histoire personnelle des personnages, pris dans la tourmente de faits qu’ils ne peuvent maîtriser, mais auxquels ils ont survécu, ou du moins pensent avoir survécu. Car des blessures invisibles mais indélébiles sont ancrées dans leur psyché et leurs corps maltraités. Leur traumatisme est encore une plaie à cautériser, un bloc de glace à rompre (il y a pas mal de références au froid, sous forme de glaçon ou de neige dans le roman, le titre lui-même en français ou VO : Midwinter Break…).

J’ai eu un gros faible pour Gerry, du mal avec Stella, surtout au début.  Puis elle m’a fendu le coeur, forcément ! Gerry avec sa bouteille et ses bleus au menton, sa maladresse, ses conclusions à l’emporte-pièce  est un vieil Irlandais craquant !

Un très joli roman,  subtil, minutieux, aux personnages attachants. Un portrait tendre et réaliste d’un couple âgé, pas du tout gnangnan.
Bernard MacLaverty questionne l’amour, la solitude, la fuite,  la foi, les blessures intimes, la difficulté de vieillir – ensemble ou seul.

Sourire quand, en plus, je trouve une référence à un roman de Joseph O’Connor dans l’histoire!

Jours d’hiver a obtenu le prix du livre de l’année 2017 aux Irish Book Awards. C’est le premier livre que je lis de l’auteur (faut dire qu’il en écrit un tous les 20 ans environs !)

Ma 10e lecture pour la rentrée littéraire et mon 5e roman irlandais pour cette rentrée d’automne.

A propos Maeve

Blogueuse littéraire depuis 2009, lectrice compulsive depuis l'âge de 6 ans ^_^ .
Cet article, publié dans Littérature irlandaise, Rentrée littéraire, est tagué , , . Ajoutez ce permalien à vos favoris.

4 commentaires pour Jours d’hiver – Bernad MacLaverty

  1. lewerentz dit :

    Illico dans la liste de lectures à suivre !

    Aimé par 1 personne

  2. alexmotamots dit :

    Merci pour ton billet bien tentateur.

    Aimé par 1 personne

Répondre à lewerentz Annuler la réponse.