Traduit par Laetitia Devaux
« Elmet est le dernier royaume celtique indépendant d’Angleterre. A l’origine, il s’étirait jusqu’au val d’York… Au XVIIe siècle, cette étroite vallée (…) était encore une « mauvaise terre », un sanctuaire pour ceux qui souhaitent échapper à la loi. » Quelques mots du poète anglais Ted Hughes en préambule du roman qui porte cet étrange nom qui claque et brille.
Fiona Mozley va vous mener du côté de la fange, de ceux qui vivent en marge de la société. Pas dans un bidonville ou un quartier pauvre, mais à la lisière d’une forêt, au bord d’une voie de chemin de fer. C’est là que John Smythe a décidé de constuire sa maison, avec sa fille Cathy et son fils Daniel. C’est Au début on ne sait rien d’eux. C’est Daniel qui va nous raconter l’histoire, alors qu’il marche, qu’il cherche quelqu’un. On comprendra plus tard. John est un « géant barbu ». Avec lui et Cathy, ils ont vécu de la forêt, éloignés des fermes et du village. On croit être seuls dans une forêt mais « les fantômes de l’ancienne forêt se manifestaient encore lorsque le vent soufflait. Le sol regorgeait d’histoires brisées qui tombaient en cascade, pourrissaient puis se retransformaient dans les sous-bois de façon à mieux ressurgir dans nos vies. On racontait que des hommes verts avec des visages en feuille d’arbre et des membres en bois noueux scrutaient depuis les fourrés. »
John a jusque là vécu de combats, de la force de ses poings. C’est à la mort de sa mère et parce que sa fille est persécutée par les garçons de son école qu’il décide d’aller vivre dans le Yorkshire rural, sur une terre appartenant à la mère des enfants. Cette dernière a claqué la porte du domicile pour ne jamais revenir, pour le peu qu’elle y a été. La décision de John va faire basculer leur vie. Ils vont vivre avec les misérables. Peter, un gars qui vivaient comme manoeuvre pour des entreprises en bâtiment avant qu’elles fassent faillite. Il se met alors à son compte et arrive à s’en sortir jusqu’au jour où un accident lui fait perdre l’usage de ses jambes. Certains clients sont récalcitrants pour payer leur dette et il demande à John de l’aider. Ce n’est que le début. Quand Price, gros propriétaire explique à John qu’il a bâti sa maison sur un terrai qui ne lui appartient pas. Price c’est le big boss des propriétaires. C’est lui qui contrôle tout. Il propose un deal à John, qui refuse de se servir de ses poings pour récupérer des impayés pour le compte de Price. Peter ne peut pas aider John et lui conseille de faire appelle à Ewart Royce, un ancien mineur. Sur les plans de Peter, Cathy et Daniel se font embaucher au black pour le compte d’un certain Coxwain, dont la spécialité est d’embaucher sans les déclarer des journaliers en difficulté de réinsertion pour peine de prison.
« Je paie pour une terre. Pour avoir le droit de vivre dessus. Ça paraît peut-être évident, mais c’était pas comme ça quand mon propriétaire c’était la municipalité. A l’époque, on considérait aussi que mon argent servait aussi à entretenir la maison. Alors que maintenant, la baraque pourrait s’écrouler demain, Jim Corvine viendrait toujours chercher son loyer. » « Tous les propriétaires du coin boivent et chassent ensemble au manoir. Ils font tous des affaires ensemble. Ils investissent ensemble. Ils bouffent tous au même ratelier. »
John tente une rébellion avec l’aide de ceux qui se font exploiter pour le compte de Price. Mais celui-ci n’a pas dit son dernier mot. Un drame supplémentaire va faire basculer l’histoire dans une noirceur absolue.
Un conte gothique et social, qui fait également une place majeure à la nature. J’ai trouvé dans cette histoire un peu de l’âme de Steinbeck, alliée au lyrisme de Ted Hughes.
Un roman qui fait la part belle au droit des femmes mais aussi des hommes à disposer de leur corps et de leur vie comme ils l’entendent. Un roman contre l’exploitation humaine et la loi du plus riche.
La fin est un coup d’éclat qui vous laisse étourdi.
Daniel trouvera-t-il ce qu’il cherche ? L’auteure vous passe la plume…
C’est magnifiquement écrit, c’est une histoire noire mais il en émane une étincelante beauté. Finalement, je retrouve dans ce roman ce qui avait porté mon enthousiasme pour Né d’aucune femme de Franck Bouysse.
Un coup de coeur. Lisez-le !
Je remplis par la même occasion le 1er challenge de l‘Irish Readathon : « Lire un livre avec une couverture verte », irlandais ou pas. Fiona Mozlay est anglaise.
Réservé à ma BM, je suis impatiente !
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Tu devrais aimer !🤩
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