Le bleu des abeilles – Laura Alcoba

C’est l’histoire d’une petite fille argentine de 10 ans dont le papa est emprisonné à La Plata, pour dissidence. C’est l’histoire de l’autrice, Laura Alcoba, qui va devoir rejoindre sa mère en France. L’histoire d’un exil vu par une enfant,  donc. Le point de vue, l’expérience, m’intéressait.

La narratrice apprend le français au pays, grâce à une professeure. Dans ses cours, Paris est celui des cartes postales, tous les chiens s’appellent Médor et les chats Minou, les personnages de son livre de lecture se nomment Marguerite,  Jean, Catherine. Elle apprend  des chansons par coeur, comme  Au clair de la Lune, Frères Jacques. Elle s’applique tout ce qu’elle peut à prononcer correctement  ses « voyelles sous le nez« . Le plus important est de s’intégrer,  d’être invisble, de se fondre dans la masse des Français.

Nous sommes dans la France et l’Argentine de 1979. La petite fille, après plein d’histoires de papier administratifs jamais tout à fait complets, traverse l’océan et rejoint sa mère.  Première surprise : sa mère n’habite pas à Paris, mais au Blanc- Mesnil, en Seine-Saint-Denis, dans la cité de la Voie Verte, avec pour voisins tout plein d’immigrés espagnols, portugais, italiens. Le quartier latin, quoi ! En face, c’est le quartier des Noirs et des Arabes. Parfois, elle accompagne sa mère qui travaille dans les quartiers huppés de Paris, pour emmener les enfants handicapés mentaux de riches familles, dans une maison de thérapie appelée Claparede. Elle se rend bien compte qu’il y a (déjà) deux France différentes : celle des gens aisés et celle des immigrés, qui vivent en marge de ce Paris où tout brille.

La petite fille correspond avec son père emprisonné. Celui-ci n’a droit qu’à un seul livre, et écrit en espagnol. Il a choisi Le bleu des abeilles de Maeterlink. Laura le trouve en français et c’est l’occasion d’un échange « prétexte  » entre eux sur une bizarrerie de la nature : est-il vrai que les abeilles aiment le bleu ?

Bleu. C’est la couleur de ce livre « frais », qui raconte sous un air faussement innocent, la réalité d’un exil, d’un déracinement, d’un accent qui ne s’efface pas, du regard des autres, comme cette bibliothécaire qui pense que Les fleurs bleus de Queneau est trop compliqué pour une petite fille étrangère de dix ans. Ça raconte la honte quand les gens vous parlent comme à une débile parce que vous faites des erreurs dans votre langue d’adoption ou que votre accent vous trahit.

J’ai trouvé le déracinement, la découverte d’un nouveau pays réussis, notamment la confrontation entre le pays fantasmé et la réalité, racontés avec humour, ce qui ne gâche rien ! Cela parlera à n’importe quelle famille qui a vécu l’exil.

En revanche, j’ai trouvé qu’on perdait complètement et assez rapidement le père de vue. Que l’ensemble des dix-huit chapitres qui constituent ce livre manquait de liant. On saute un peu du coq à l’âne, si je puis dire. C’est dommage.

Malgré ce défaut selon moi, j’ai globalement apprécié cette lecture qui me donne envie de creuser un peu plus du côté de la littérature et de l’histoire de l’Argentine dont j’ai une ignorance crasse. Je suis toute ouïe si vous avez des livres à me conseiller.

Laura Alcoba est professeure d’espagnol, traductrice et écrit en français.

A propos Maeve

Blogueuse littéraire depuis 2009, lectrice compulsive depuis l'âge de 6 ans ^_^ .
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