American Predator – Maureen Callahan

Traduit par Corinne Daniellot

J’aurais aimé que ce livre soit un polar, une fiction. Mais c’est une histoire vraie ! Croyez-moi, après une lecture pareille, on devient peut-être un peu parano. J’ai terminé ma lecture lors d’un périple entre la France et un pays hors UE, en me disant que dans le train, il y avait peut-être un tueur.🥶 Bon, ce qui est rassurant, si on peut dire, c’est que cette sordide « histoire » se passe aux États-unis, qui a vu naître tellement de serial killers, qu’on peut s’interroger… Il y en a très peu en France, du moins, on pense, mais si c’est comme cette affaire ahurissante ce n’est pas très rassurant non plus.😱

En effet, c’est vraiment un hasard qui a mis au jour Israël Keyes. Le 1er février 2012, par une nuit glaciale dont l’Alaska a le secret, Samantha Koenig, 18 ans, disparaît subitement. Elle travaillait dans un café d’Anchorage depuis 1 mois. C’est sa collègue qui donne l’alerte quand elle ne la trouve pas le lendemain. La brigade criminelle (Anchorage Police Department) est sur l’affaire, avec une stagiaire, et Serge Payne, agent du FBI . Aucune alarme n’a été déclenchée par Samantha, son petit ami est interrogé mais n’a aucune info, à part une querelle d’amoureux. Il est rapidement mis hors soupçon. Le visionnage de la caméra montre une scène étrange. Un homme imposant, une voiture, Samantha les mains en l’air, ils repartent ensemble très calmes. L’ADP pense un instant que Samantha n’est peut-être pas une victime. Le père commence à prendre les choses en main devant les supputations un peu débiles de la police. Il balance la disparition de Samantha sur Facebook. Une voiture est identifiée, retrouvée, finalement par l’ADP qui craint un retentissement médiatique de l’affaire et l’avis de l’opinion publique. Un homme est intercepté sur le parking d’un hôtel et interrogé. Il avoue facilement. Le lecteur connaît donc quasiment dès le début le coupable.

A l’instar de l’ADP et du FBI, c’est une lente descente aux enfers qui commence. Israël Keyes a l’habitude de commencer ses histoires par la fin. Il conclut un pacte avec la police : il veut la peine de mort. Il ne veut pas que l’affaire soit livrée aux médias. Il racontera tout. Dans le détail. Ses parents étaient carrément tarés, membres successivement de multiples sectes, des Mormons aux Amishs, pour les plus connus. Ils vivaient en marge de la société, en total autarcie. Israël, comme ses nombreux frères et soeurs ne connaissent rien de la modernité : pas de télé, pas de cinéma, pas de musique etc. Comme l’héroïne des Ravissements de Jan Carson, son enfance a été abîmée par des fondamentalistes religieux. Pourtant, c’est le seul enfant à avoir rapidement un comportement déviant, pour finir par devenir un tueur en série. On suppose que ses premiers meurtres ont été perpétrés à l’adolescence, après avoir franchi un cap dans le sadisme pervers. Mais personne ne s’aperçoit de rien. Ils sont plusieurs dans sa tête, au moins deux, c’est lui qui le dit. De toute façon, il ne va pas à l’école, il n’est pas identifié officiellement sur les registres des naissances (je ne sais pas comment ça se passe aux États-unis), bref, officiellement il n’existe pas. Jusqu’au jour où il décide de rentrer dans l’armée. C’est à ce moment qu’il se rend compte qu’il n’a pas été élevé comme les autres, devant les réactions étonnées de ses camardes. Il rencontre d’autres types pas franchement recommandables. Il découvre l’alcool, le LSD, mais est capable de garder le contrôle même complètement ivre. Il a des capacités et une intelligence hors normes. Comme beaucoup de serial killers, d’ailleurs.

Keyes explique aux flics comment il est parvenu à ne jamais laisser de traces de son passage après les meurtres, comment il n’a jamais été pincé, comment il choisit ses victimes. Comment de nombreuses personnes lambda ont croisé son chemin et échappé à la mort de justesse, par hasard. Le hasard, c’est l’autre « jeu » de Keyes. Pas de profils types. Ça peut être toi ou moi.😱

Brièvement on a l’impression qu’il est devenu quelqu’un de bien quand il devient père, que la naissance de sa fille l’a transformé. Évidemment, c’est un leurre.

Maureen Callahan, journaliste d’investigation, montre également comment les querelles de clocher de la police et du FBI et autres décisions absurdes ont nuit à l’enquête, fait échoué certaines tactiques pour découvrir toutes les victimes de Keyes. Officiellement, il y en a onze. Mais en vérité certainement beaucoup plus à travers tous les États-unis. Car le psychopathe avait comme stratégie de mettre de la distance entre le lieu du meurtre et le cadavre de sa victime.

On ne saura jamais l’entière vérité sur cette affaire puisque le monstre est resté maître jusqu’au bout, en faisant une douzième victime officielle : vous saurez qui en lisant ce livre, pas très reposant d’un point de vu nerveux, mais très bien écrit et qui se lit vraiment comme un thriller – dont on aurait aimé que le true crime soit une fiction, en fait.

L’affaire Keyes ne sera jamais classée. Le profil psychologique de ce mec reste en partie brumeuse. Ça file vraiment la frousse, d’autant plus quand on ne fait pas spécialement confiance en l’être dit humain.

Grand Prix de littérature policière 2022.

A propos Maeve

Blogueuse littéraire depuis 2009, lectrice compulsive depuis l'âge de 6 ans ^_^ .
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7 commentaires pour American Predator – Maureen Callahan

  1. Je l’ai… pas encore commencé !

    Aimé par 1 personne

  2. alexmotmots dit :

    Une lecture qui fout plus la frousse que lorsqu’on lit de la fiction.

    Aimé par 1 personne

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