Traduit par Elsa Damien
Le roman commence in medias res : un appel inquiet sur la disparition d’une femme d’une soixantaine d’années. La narratrice est coutumière des frasques de Raffaella Cerullo, qu’elle connaît depuis trois décennies : c’est sa meilleure amie. Pleine de colère vis-à-vis de celle qu’elle a toujours appelé Lila, elle dégaine son ordinateur et commence à écrire leur histoire.
Nous sommes plongés dans le quotidien de deux gamines d’un quartier populaire de Naples dans les années 50. Lenuccia Greco, dite « Lenu » devient l’amie de Rafaella Cerullo, appelée par tout le monde Lina mais qui restera à tout jamais « Lila » pour Lenu…
Lenu est fascinée par Lila, bien que celle-ci soit quelqu’un de très méchant (!). Mais elles se complètent toutes les deux comme le ying et le yang. Lenu est blonde, belle, plutôt spontanée, naïve et studieuse. Lila est brune, maigre, laide, calculatrice et surdouée. Le père de Lenu est portier à la mairie de Naples, celui de Lila est cordonnier.
Lila est obligée d’arrêter l’école pour aider son père à la cordonnerie. Lenu aura la chance de poursuivre ses études jusqu’au grand lycée, grâce à l’insistance de ses enseignants qui devinent en elle quelqu’un de brillant.
Elles rêvent d’avoir de l’argent, de devenir riches comme l’a fait l’auteur des Quatre filles du docteur March, le roman chéri qu’elles ont lu et relu toutes les deux jusqu’à ce qu’il devienne un torchon. L’idée était « qu’en travaillant beaucoup (elles) écrir(aient) des livres et ces livres [les] rendraient riches ».
La manière de devenir riche va évoluer au fil du roman où le lecteur suit la vie de ces deux gamines adolescentes dans la société italienne de l’après guerre : une société menée par les hommes, où l’argent sale et la violence sont le quotidien. Violence de la rue ou violence familiale. En effet, ça hurle dans les « chaumières » de ce quartier populaire de Naples où les objets passent par la fenêtre assez facilement. La violence des règlements de compte que l’on devine mafieux même si ce n’est pas dit clairement. L’argent sale de cette même mafia ou du fascisme qui a permis à certains d’ouvrir leur commerce et de le faire prospérer…
Un roman d’apprentissage plutôt violent aussi dans la rivalité entre Lila et Lenu. Elles sont amies mais tout de même d’une drôle de manière. Coups bas et petits règlements de compte entre amies sont leur manière de garder le lien (ça m’a laissée perplexe!). Mais aussi inséparables que des soeurs jumelles. Elles se crêpent le chignon à leur façon, sans effusion de sang mais de manière à en laisser des traces….
L’une deviendra une femme entretenue et qui fera l’objet de sarcasmes sur le pourquoi du comment elle parvient à s’attacher un homme qui lui voue une dévotion aveugle et un peu débile.
« Je me rendis compte que la richesse dont nous rêvions enfants était encore en train de se métamorphoser. Les coffres remplis de pièces d’or qu’une procession de serviteurs viendrait déposer dans notre château quand nous aurions publié un livre comme Les Quatre Filles du docteur March – richesse et célébrité – s’étaient définitivement évaporés. Restait peut-être l’argent comme ciment capable de consolider notre existence et celle des personnes qui nous étaient chères(…) » observe Lenu.
Je n’ai pas eu de sympathie pour le personnage de Lila, son côté calculateur et son génie pendant que sa copine trime comme une malheureuse pour ses études (même si elle réussit à merveille), en devient grosse et boutonneuse pendant que l’autre devient belle et attirante, apprend grec et latin sans être allée au lycée : la vie est injuste !! 🙂 Mais le début du roman fait comprendre qu’il y a une récompense…
Je me suis laissée emporter par ce roman qu’on voit partout et partout et encore partout ! Elena Ferrante (dont on ignore tout et qui reste volontairement un mystère) brosse avec justesse le tableau de la société napolitaine des années cinquante. Derrière le bleu de la mer, il y a la violence. Derrière le boom économique, il y a l’argent sale.
Je reproche juste une certaine longueur sur la fin, avec l’épisode de la préparation du mariage.
Un roman un peu singulier sur l’amitié également, hors des sentiers battus.
J’ai tout de même moins aimé la plume d’Elena Ferrante que celle de Niccolò Ammaniti et d’Andrea Molesini, sans doute parce qu’il n’y a pas d’humour.Je lirai sans doute la suite (Le nouveau nom) quand il sera publié en poche.
Cela ne m’étonnerait qu’à moitié que ce premier volume ne soit pas transformé en film…
Il est vrai qu’il est difficile de louper ce livre en librairies et tout endroit qui vends des livres.
Je suis à chaque fois à deux doigts de craquer mais j’attends de le trouver en occasion.
Une chose est sûre, je compte bien le lire et prochainement sera le mieux.
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C’est à force de le voir surtout parce que je découvre la littérature italienne contemporaine en ce moment que je l’ai acheté. Je m’étonne moi-même parce qu’en général, quand je vois trop un livre partout, justement, je ne le lis pas ou alors quand plus personne ne parle de lui – j’ai un peu l’esprit de contradiction et je suis persuadée que ce n’est pas parce qu’on voit un roman partout que c’est un bon roman. Avec celui-ci on passe un bon moment mais j’ai nettement préféré ceux qui j’ai évoqué avant sur ce blog. 🙂
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Je compte bien le piquer à ma mère le mois prochain !
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Bonne idée. Mais je te conseille encore plus les autres tromans italiens chroniqués. 😉
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Ma mère vient de le finir et elle l’a beaucoup c’est ce qui m’a convaincue car je suis un peu comme toi, méfiante 😉 !
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A force de le voir partout, je commence à être intriguée. J’aimerais connaître Naples pour apprécier davantage la lecture de ce livre.
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J’ai bien aimé mais je pense qu’on en fait aussi un peu trop sur ce livre. C’est aussi parce qu’on le voit partout que j’ai fini par me demander ce qu’il avait de si particulier… 🙂
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