Traduit par Jean Esch
Devon est une gymnaste surdouée. Montée sur la poutre à l’âge de 3 ans, plus rien de l’arrête. Elle gravit les échelons des compétitions de gymnastique. Eric et Katie, ses parents, ont tout sacrifié pour leur fille prodige. Ils sont à ses côtés, ils la soutiennent. D’autant plus qu’un jour un accident avec la tondeuse à gazon a amputé Devon de deux orteils. Malgré tout, son « Frankenpied » n’empêche pas la jeune gymnaste de coiffer tout le monde au poteau. C’est « une cérébrale, une anxieuse », souligne son père. « Elle ne débranche jamais ». « Une fille sérieuse, voilà ce que disaient tous ses professeurs. Passionnée. » Pourtant un jour, alors que tout le monde croit en elle, elle échoue à la sélection pour l’Elite Junior qui lui aurait ouvert la voie royale vers les compétitions nationales, internationales et olympiques. Un pied maladroit et tout se complique. Les parents de Devon mettent le prix pour qu’on creuse une fosse de réception dans le gymnase où elle s’entraîne. Un pied maladroit et tout se complique ? Et l’apparition de Ryan Beck, le beau jeune homme qui construit la fosse et chavire les coeurs. Jusqu’au jour où… il meurt (je ne rentre dans dans le détail des circonstances de la mort pour ne pas vous spoiler l’histoire, même si j’ai déjà l’impression d’en dire trop). Le temps des ravages est arrivé.
Avant que tout se brise est le premier thriller que je lis de l’Américaine Megan Abbott. I Will Know Me est le titre original qui bien plus évocateur à mon sens sur le contenu de ce roman.
Je ne savais pas trop à quoi m’attendre. Je pensais plutôt à un roman sur le monde de la compétition de haut niveau, d’autant que chaque chapitre est introduit par une citation de Nadia Comanesci. J’imagine que le personnage de Devon en est inspiré. Mais ce thriller va au-delà.
L’omniprésence des corps est frappant. Celui de Devon qui a arrêté sa croissance à cause de la pratique du sport intensif . « Haute comme trois pommes, forte comme un tigre », dans un corps qu’elle malmène pour arriver au meilleur. Un corps de gamine mais ne l’empêche pas de grandir dans sa tête et de devenir une adolescente comme les autres, contrairement à ce que s’imaginent ses parents. Ses parents qui vont découvrir quelqu’un qu’ils ne connaissent pas, en elle. C’est aussi le fil ténu de l’intrigue. 🙂 Mais sait-on jamais qui est l’autre, même si c’est la chair de sa chair ? Sait-on jamais qui on est ?
Megan Abbott infuse le doute de manière insidieuse et lente. Katie découvre que sa fille est devenue quelqu’un d’autre qu’elle ne connaît pas. Mais Eric, son mari ? « Dix-sept ans qu’elle le connaissait : la douceur particulière de l’intérieur de ses poignets, sa manière de siffloter à chaque fois qu’il entrait dans une banque, la chorégraphie précise de ses doigts quand il voulait qu’elle se retourne au lit. Et sentir maintenant qu’elle ne connaissait rien du tout. » « Comment pouvait-on être marié avec quelqu’un tout se vie, lui semblait-il, et ne pas le connaitre du tout. » Flippant, non ?
Et puis il y a Drew, le petit frère, à l’imagination débordante, que personne n’écoute quand il dit des choses étranges sur sa soeur. Katie pense qu’il a rêvé. Sans doute à cause de la fièvre de la scarlatine qui a ravagé son corps. Jusqu’au jour où, sous la peau qui pèle apparaît un visage qui semble différent. Le visage de celui qui prend conscience que ses parents ne sont pas parfaits…
L’atmosphère de ce thriller psychologique vous étreint et vous fait douter jusqu’au bout. Des fausses pistes. Des mensonges. Des phrases à double sens. De la rivalité, les ravages de la compétition et de la jalousie, que ce soit dans le sport ou dans le désir amoureux. Difficile d’être différente et surdouée. La violence psychologique et physique est omniprésente mais de manière insidieuse. Pas de scène pleine de sang, c’est bien plus fin que cela. Une violence qui conduit à l’erreur : « devait-on payer éternellement pour une erreur fugace ? Un coup de volant, un pied qui dérape, une pause qui a duré quelques semaines de trop ? » « Toutes ces choses que vous ne pensez pas faire un jour, jusqu’au jour où vous les faites. »
Peut-on gagner à tout prix ?
Un thriller riche, même si je me suis un peu perdue en cours de route avec des moments où j’ai trouvé qu’il y avait quelques longueurs, avant que le suspense ne me reprenne par la main. J’ai relu le début du livre une fois terminé parce que tour de force c’est qu’il prend tout son sens quand on a fini le roman.
Il y a toute une histoire avec les artémies de Drew mais je ne suis pas tout à fait sûre de comprendre tout le sens.
Enfin, je me suis agacée avec les coquilles du texte qui font perdre le sens des phrases. Par trois fois. Au prix où sont vendus les livres, faudrait tout de même les faire relire sérieusement, les éditions du Masque !
Une lecture marquante, c’est certain.
Une fois n’est pas coutume, je vous mets le clip de Gotye qui va assez bien avec ce thriller.
La lecture t’a plu, malgré les coquilles (on sent que cela t’agace profondément….)
J’aimeJ’aime
Etrange ton commentaire.
J’aimeJ’aime
Tu parles bien dans ton article des coquilles d’édition qui t’horripilent ?
J’aimeJ’aime
Ce n’est tout de même pas l’essentiel de mon billet. Ca m’agace, certes mais pas au point de « m’horripiler » comme tu dis . 😊
J’aimeJ’aime