Eliza et ses monstres – Francesca Zappia

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Traduit par Fabienne Vidallet

Eliza est une lycéenne très introvertie, elle n’a pas d’amis, ni au lycée ni ailleurs. Elle est la fille « bizarre », celle qu’on ne remarque pas si ce n’est par ce défaut de ne parler à personne, qui peut passer pour du dédain.  Elle est celle que l’on prend pour la pauvre fille. Elle est persuadée que ses deux petits frères la déteste et finalement, son meilleur ami est Davy, un énorme chien des Pyrénées qui lui sert régulièrement d’oreiller. Bref, sa vie ressemble à la lose la plus totale.
Sauf que.
Eliza est une star du web. Elle est la créatrice d’une bande dessinée aux millions de fans : La mer infernale, dont elle poste régulièrement des planches, avidement attendues par ses lecteurs. Tout le monde ignore qui elle est puisqu’en ligne, elle publie sous le pseudonyme de LadyConstellation. Grâce à sa bande dessinée, et surtout grâce à ses fans qui lui ont demandé des produits dérivés, elle a déjà beaucoup d’argent qu’elle a mis sur un compte à part dont même ses parents ignorent l’existence. Ceux-ci sont au courant que leur fille poste une BD en ligne qui a du succès mais ils ignorent tout de l’ampleur du phénomène.
Un jour, au lycée, elle rencontre un nouvel élève, Wallace. Il la surprend en train gribouiller un carnet où il reconnaît les personnages de La mer infernale, dont il est sans doute le plus grand fan sur le forum. Très content de trouver quelqu’un qui connaît cette BD au lycée, Wallace se rapproche d’Eliza. Celle-ci ne lui dit pas la vérité, seulement qu’elle écrit une fanfiction de La mer infernale. Une idylle se noue entre les deux adolescents qui se ressemblent par leur caractère (Wallace communique le plus souvent par écrit et n’aime pas parler) et leur passion. Les parents d’Eliza apprennent avec joie qu’enfin leur fille a un petit ami : elle va enfin sortir de sa chambre et de sa coquille…
Les parents, source d’une catastrophe monumentale, du pire cauchemar qu’Eliza aurait pu imaginer…

Une autre de mes trouvailles sur Salon du livre, je trouvais le sujet intéressant de cette ado star 2.0 dont personne ne soupçonne l’identité.

Francesca Zappia aborde avec intelligence l’addiction à internet d’une  génération d’adolescents qui a toujours connu ça et n’imagine pas s’en passer. Elle montre également les dérives du système et aborde le conflit de génération. Les parents d’Eliza ont connu une vie sans tout ça, ignore presque tout de la vie des forums en ligne, des réseaux sociaux, de toute la vie numérique, de ses bons côtés mais aussi de ses travers. Ils sont tellement fière de leur fille qu’ils commettent l’irréparable sans en avoir conscience, sans mesurer la portée de leur geste (il vous faudra lire le roman pour connaître leur bévue sinon ce serait un big spoiler !).
Cependant, ce sera aussi ce qui va faire mûrir l’adolescente, la faire s’interroger sur sa communauté numérique, sur son addiction, sur elle-même et sur son art. Pour en venir à l’essentiel : la vie mérite d’être vécue et on ne peut créer que si l’on a du désir et pas en fonction de ce que veulent les autres. Avec l’aide d’une psychologue, elle va pouvoir prendre de la distance, de la confiance en elle, se recentrer, loin des trolls, des médisants et des fans envahissants.

« J’ai rencontré des artistes qui en souffert [des cauchemars] – ils ne se sentaient plus à la hauteur de leurs propres oeuvres, ils ressentaient de la culpabilité devant leur travail inachevé, de l’anxiété face aux attentes de leurs fans. C’est normal mais ça ne veut pas dire que c’est sain. Eliza, ta valeur en tant que personne en dépend pas de l’art que tu crées, ni de ce que les gens en pensent. »

« Penses-tu que les gens qui ont le plus de mérite sont ceux qui ne produisent qu’un travail excellent ? »

« La valeur d’une personne n’est pas fondée sur quelque chose de tangible. »
(avis à ceux qui pensent que leur valeur est liée à leur nombre de « like » … et bim !)

« L’humeur de ta fanbase ne devrait pas dicter ta valeur intrinsèque. »

« Les fans aimeront toujours. Tes détracteurs, eux, trouveront toujours quelque chose à te reprocher. »

Francesca Zappia a également le tact d’échapper à la bluette mièvre d’adolescents pour raconter avec sensibilité et vérité la naissance du sentiment amoureux et sa fragilité.

Un livre agréable à lire, même si j’ai trouvé un petit peu longue la phase dépressive de l’héroïne. L’objet livre est sympathiquement illustré par la BD d’Eliza (dessinée par Francesca Zappia elle-même).

C’est le premier livre que je lis sur un tel sujet mais qui parlera à tous ceux qui fréquentent le 2.0, jeunes ou moins jeunes.

 

 

A propos Maeve

Blogueuse littéraire depuis 2009, lectrice compulsive depuis l'âge de 6 ans ^_^ .
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