Traduit par Romane Lafore
Ida vit à Rome, avec son mari. Elle travaille à la radio pour une émission où elle invente de fausses histoires vraies. Un jour sa mère lui demande de venir trier ses affaires chez eux car les travaux dans l’appartement pour les fuites d’eau du toit-terrasse vont commencer. Ida se rend donc à Messine, en Sicile, dans l’appartement familial où elle a passé toute son enfance et adolescence. Elle n’est guère enchantée par cette perspective. Il y a des fuites dans le toit, endommagé depuis toujours, mais c’est aussi une famille qui s’est désagrégée peu à peu, une maisonnée qui s’est effondrée. Malgré elle, parce que les objets de son enfance sont là, que l’appartement est resté dans son « jus » depuis que le drame est survenu, Ida va devoir affronter ses fantômes.
Nadia Terra Nova nous fait partager la douleur, les remords, les cauchemars et les doutes de son personnage féminin dont elle ausculte tous les recoins de l’âme à travers les murs moisis de cet appartement, où le temps s’est nécrosé à 6h16 : « Ce matin-là, vingt-trois ans plus tôt, mon père avait ouvert les yeux à 6h16, les chiffres étaient restés figés sur le réveil assommés d’un coup sec, 616, six un six, et pendant des jours, sur le lavabo, sa brosse à dents bleue avait résisté, allongée sur la faïence, hors du verre dans lequel nous rangions nos trois brosses, emportant avec elle une traînée de dentifrice comme de la bave d’escargot. Ma mère était déjà partie, comme souvent, s’offrir de longues promenades à l’aube avant de commencer le travail. »
Ce matin-là, à cette heure précise, son père disparaît. Après de longues années de dépression passées dans son lit. Envolé. Désintégré. Plus là. Et les interrogations de ceux qui restent, les supputations, les doutes, le mal-être, les répercussions sur la vie. Une amitié qui se brise quand la douleur vous fait regarder à l’intérieur sans imaginer que le monde ne s’est pas arrêter de tourner parce que vous, vous souffrez. Une amie d’enfance à qui il arrive quelque chose de terrible également mais que la douleur d’Ida aveugle. Une mère qui reproche à sa fille de ne pas avoir eu d’enfant, donc de ne pas pouvoir la comprendre. Des volées de bois vert. Des rancoeurs enfouies qui jaillissent comme autant de coups de poing. Un couple qui met de la distance, mais finalement renaît de ses cendres. Après la tempête, la sérénité.
La prose de Nadia Terranova est aussi fluide que l’eau qui immerge les pages de son roman, métaphore filée d’un naufrage. On se laisse porter par cette histoire introspective douloureuse, mais où le bonheur, s’il est furtif, n’est pas totalement absent. Un roman dédié « aux survivants », et dont la portée nous touche par sa dimension universelle.
J’ai beaucoup aimé.
C’est le deuxième roman de Nadia Terranova, après Les années à rebours publié en 2016 dans la collection « Quai Voltaire » également.
C’est ma 4e lecture pour la rentrée littéraire. 🙂
Merci aux éditions de La Table Ronde.
J’ai failli l’acheter hier ! Je le lirai, ton avis m’a convaincue.
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J’espère que ça te plaira, alors. Bonne lecture !
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Un roman au sujet qui me tente. J’espère qu’il croisera ma route.
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Moi aussi. 😁
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