
Grand bonheur de voir la parution d’un nouveau roman noir de John Banville, dont j’ai lu tous ceux de la série « Docteur Quirke », qu’il a écrit sous le pseudonyme non dissimulé de Benjamin Black. J’étais donc surprise de voir un roman noir sous son vrai nom de plume. J’ignore s’il a abandonné la stratégie de séparer son côté écrivain de polar d’écrivain de roman définitivement mais ce n’est pas un subterfuge éditorial. Je voudrais en revanche savoir pourquoi. Je n’ai pas trouvé la réponse à ce jour.
Comme toujours avec John Banville, écrivain de roman noir, on est dans l’Irlande des années 50. L’histoire se déroule précisément entre l’été 1947, l’hiver 1957 essentiellement et se clôture brièvement à l’été 1967. 20 ans. Et l’obesssion du 7. Je me suis également interrogée.
L’inspector detective Saint John Strafford est dépêché par un temps neigeux et glacial jamais vu depuis longtemps, dans le manoir du colonel Osborne, dans un coin paumé du Wexford. Un prêtre, père Tom Lawless, a été retrouvé mort dans la bibliothèque. On pense tout de suite à Un cadavre dans la bibliothèque d’Agatha Christie. Il n’y a pas grand chose à dire de plus à ce sujet, si ce n’est qu’on débute avec un cadavre – dans une bibliothèque – et que l’histoire voudrait qu’on cherche le meurtrier. C’est ce qu’a bien l’intention de faire Strafford. Vivent au manoir, le colonel en retraite, sa 2e épouse Sylvia, sa fille Lettice, son fils Dominic, en visite, étudiant en médecine à Trinity. La cuisinière, Mme Duffy. Un palfrenier marginal Fonsey, occupe une caravane. Il y a un pub qui est aussi un hôtel où Strafford a loué une chambre.
Comme Stafford, les Obsorne sont protestants. C’est assez étrange qu’un prêtre catholique soit retrouvé chez eux. Mais on apprend que le prêtre était un ami de la famille. Soit disant un amoureux des chevaux…
Nous savons qu’en plus d’avoir été égorgé, Lawless a été émasculé. Bien évidemment, les autorités ne diront pas l’entière vérité. Pensez donc ! Strafford interroge les différents personnages. Mais on ne peut pas dire qu’il mène vraiment une enquête. Il est dérangé par cette impression de théâtre en carton-pâte. Tout lui paraît artificiel, jusqu’aux vêtements du colonel. C’est un peu comme si les personnages étaient sortis d’un roman. C’est plutôt l’adjoint de Strafford, Ambrose Jenkins qui s’occupe en réalité de l’enquête, jusqu’au moment où…. il disparaît !
On retrouve l’ironie mordante de John Banville, son humour dévastateur. Un roman noir plein de subtilités en dépit d’une apparente simplicité. Et un bon coup de griffe à l’église et ses représentants. Un roman d’ambiance, des personnages bien évidemment pas aussi lisses qu’ils voudraient le laisser croire.
Je me suis beaucoup amusée, j’ai jubilé de voir de brèves allusions au docteur Quirke, me demandant s’il allait entrer en scène. Il était parti en lune de miel. Je ne sais plus vraiment où je l’ai laissé la dernière fois, mais des petites allusions à la fameuse série que seuls les vrais amateurs de littérature irlandaise auront lue, était tout à fait plaisante ! On retrouve également, en arrière plan, le Detective Chief Superintendant Hackett…