
J’ai peut-être écrit ma chronique sur mes meilleures lectures de l’année 2022 un peu trop tôt ! Je ne soupçonnais pas qu’une – effrayante – pépite dormait sur mes étagères depuis un an.
C’est la première fois que je lis un roman de Fiona Kidman, autrice néo-zélandaise née en 1940. Je ne sais même pas si j’avais déjà lu de la littérature néo-zélandaise, d’ailleurs, mais c’est une entrée en la matière que je ne pourrai pas oublier.
Albert Black est un roman tiré d’une histoire vraie, une histoire qui va faire basculer la justice en Nouvelle- Zélande. Cette histoire va être celle de la dernière exécution, la dernière peine capitale de l’histoire du pays.
Oubliez la belle image de carte postale que vous avez de la Nouvelle-Zélande. Derrière les paysages paradisiaques se cachent, dans les années 50, des histoires tragiques, des injustices, des autodafés, du racisme envers les migrants européens, notamment irlandais et écossais, venus chercher là une vie meilleure. 1954, le gouvernement conservateur rétablit la peine de mort dans le pays, la peine capitale par pendaison, pour soi-disant éradiquer la délinquance et la dépravation des moeurs.
Pas de chance car c’est en Nouvelle-Zélande qu’un jeune Irlandais protestant de Belfast voit son avenir. A 18 ans, juste après la parade orangiste, il embarque pour Wellington. Adieu pays sectaire ! Il trouve du travail, puis décide d’améliorer sa vie un peu plus en allant à Aukland. Tout se passe bien, il fait des rencontres, a quelques amourettes, garde une maison en l’absence de sa propriétaire. Il est donc logé gratuitement. Mais celle-ci exige qu’il n’y ait aucune visite, et encore moins des petites amies. Les voisins le sauront et lui rapporteront les faits si cela se produit, dit-elle. Bonjour l’ambiance ! Les jeunes se retrouvent le soir dans les bars, les garçons lorgent les filles et les filles jacassent sur eux. Tout ce petit monde s’amuse comme il peut dans un pays à la morale étriquée et néanmoins ça picole sec.
Albert Black rencontre un autre migrant, à qui il décide de rendre service le temps qu’il trouve un nouveau logement. Seulement, le mec n’est pas vraiment un ange. Colérique et jaloux, et un certain goût pour la bagarre. Il calque son personnage d’un roman américain interdit. C’est à peu près le seul côté sympathique qu’on peut lui trouver. « J’ai vingt-quatre ans et j’encule tous ceux qui osent me dire ce que je dois faire. » Albert est pris au piège avec ce type dont le passé et l’origine restent flous.
Les choses tournent doublement vinaigre entre eux. Pour des broutilles. Une histoire de filles. Dans une ambiance pas claire, noyée dans les brumes de l’alcool, McBride est tué. Black est accusé de meurtre. Il est emprisonné, jugé et [spoiler] pendu. Il avait 20 ans. Il s’imaginait un avenir ici, non sans avoir eu le mal du pays. Mais ce n’est pas dans les rues de Belfast qu’il trouvera la mort…
Fiona Kidman décrit avec minutie le procès de l’accusé, le côté rocambolesque et malsain, ces témoins pas franchement clairs dans leurs propos, un avocat qui se démène pour démontrer l’inexactitude des faits décrits. La mère d’Albert fait une pétition depuis Belfast pour sauver la vie de son fils. Elle rencontre une personne qui milite contre la peine de mort.
On suit la vie du condamné, on s’immisce dans ses pensées. C’est incroyablement stressant, parce que la retranscription de ce qu’a pu vivre ce jeune est très réussie.
Ce n’est pas un livre dans lequel on plonge immédiatement. Il m’a fallu le laisser infuser une centaine de pages pour remettre ce qui m’était donné à lire, dans l’ordre. C’est assez dense parce que tout est soigneusement décrit sans pour autant suivre les faits de manière chronologique. Les pièces du puzzle se mettent en place au fil des pages.
Cette histoire vraie hantera vos nuits. Vous serez marqué au fer rouge par cette page peu glorieuse de l’histoire de la Nouvelle-Zélande. Il a fallu un article d’un journaliste pour ébranler l’opinion publique et contribuer à l’abolition de la peine de mort dans le pays.
NB : j’ai remarqué que certains passages de mes chroniques sont mis en surlignage. Sachez que ce n’est pas mon fait, mais que c’est un truc automatique de WordPress, super moche ! Je n’ai pas encore réussi à régler le problème.
Après un tel billet, difficile de ne pas le noter ! (et tu pourras toujours tricher un peu en l’incluant dans ton bilan 2023 :)..)
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Merci. 🤗
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Tu finis l’année en beauté ! Je note, bien sûr.
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