Traduit par Marie Hermet
Linus, adolescent fugueur, propose son aide à un handicapé, dans une gare londonienne où il a l’habitude de zoner. Très mauvaise idée ! Il se réveille enfermé dans un endroit inconnu, sans fenêtres ni portes, composé de six chambres, une salle de bain avec toilettes, une cuisine équipée. Dans un placard, il trouve 6 assiettes, 6 grandes tasses à thé, les couverts assortis, le tout en plastique. Pas de miroir. Pas d’interrupteur. Pas d’accessoires. Une horloge. Un ascenseur qui ne mène nulle part. Un bourdonnement. L’air est lourd et humide. Très vite, arrivent dans cet endroit une petite fille de 9 ans qui-veut-sa-maman, une jeune femme qui se-la-raconte, un consultant alcolo et arrogant, un junkie, un vieil homme, noir, homosexuel, malade et… borgne – tant qu’on y est 🙂 !
Il s’avère que tout ce petit monde est enfermé dans un bunker. Avec des caméras partout. Mais partout : même dans les toilettes. Aucune intimité. Les personnages s’interrogent sur l’identité du kidnappeur et ses motivations :
« Un psychopathe.
Un pervers.
Un collectionneur. De gens.
Qu’est-ce qu’il veut ?
Nous observer.
Nous tuer.
Nous garder comme animaux de compagnie. »
Nous connaissons ce qui se passe dans cet endroit grâce au journal intime tenu par Linus (le titre original du roman est d’ailleurs The Bunker Diary).
Une forme d’organisation s’installe dans l’enfermement. Chacun arrive à cohabiter, malgré quelques tensions. Leur motivation est l’espoir de pouvoir s’échapper de ce trou à rats. Tout ça est facile tant qu’on a le ventre plein, qu’on n’a ni trop chaud ni trop froid, qu’on est propre et en bonne santé. Les idées claires. Tant qu’il y a l’espoir…
Mais tout devient beaucoup plus compliqué quand une tentative d’évasion individuelle entraine une dégradation des conditions de vie et que tout le monde se met à en souffrir…
Le bandeau sur le livre annonçait un roman « ignoble et dangereux », d’après The Telegraph et « monumental », d’après The Times. Je me méfie toujours des grands mots sur les bandeaux. Mais j’avoue que c’est mérité !
J’étais prévenue que ce thriller empêche de dormir. J’ai eu du mal à trouver le sommeil. Parce que ce thriller est addictif, certes. Mais pas que. C’est atroce et cela empêche de dormir parce que Kevin Brooks place le lecteur dans une position inconfortable. Qui est le kidnappeur et qu’observe-t-il ? La même chose que nous ! Et grâce à qui ? Au journal tenu par Linus ! Alors pourquoi lit-on ce livre ? On est se sent comme un abominable lecteur-voyeur ! On est réduit à ça.
En outre, si l’histoire est absolument terrible et le tortionnaire de ces personnages absolument machiavélique et ignoble, il y a aussi de l’humour noir dans ce roman.
Je me suis aussi demandé si Kevin Brooks ne flirtait pas avec une forme de parodie, par moments. Linus, (qui doit son prénom à la BD Les Peanuts !) est un vrai jeune héros au grand coeur, courageux, intelligent, consciencieux : il écrit son journal jusqu’au bout du bout, même si à la fin, on n’a plus de numéros de pages ! Le vieil homme borgne vaut le détour. Le consultant est à flinguer (oups !), la jeune femme à claquer (re-oups). On aime bien le junkie, qui est peut-être le seul personnage assez sympa, avec la petite fille, et Linus. Le vieil homme d’abord sympathique, devient inquiétant dans son comportement, mais on ne sait pas si c’est à cause de sa maladie (il a une tumeur au cerveau !).
Bon, je vous renvoie aux pages 174-175 pour savoir ce que ça fait quand on mange de la nourriture droguée à un truc qui vous fait vous sentir « bizarre pas complètement désagréable. Mais pas bizarre sympa non plus. Juste bizarre bizarre. Comme sur une autre planète. » 🙂 Je me suis demandé si on avait mis quelque chose dans mon potage, parce que c’est assez incroyable l’impression que j’ai eue avec ce passage : c’est tout à fait ça.
D’ailleurs, peut-être que ça se ressent encore dans ma chronique tordue…
Un thriller plein de sensations, couronné « la très prestigieuse médaille Carnegie » outre-Manche.
Je ne me suis pas ennuyée trois secondes.
Ah oui, ça a l’air tordu !
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C’est vicieux! 😜
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