En rentrant de vacances, Victor, le narrateur, découvre dans son courrier en instance une lettre qui va le ramener plus de vingt ans en arrière, en septembre 1984, époque où il était élève en khagne à Paris.
De milieu modeste, bon élève, mention au bac qui change tout, il est admis en prépa littéraire, loue une chambre à Nanterre, rompt avec sa petit amie et sa ville d’origine où il avait beaucoup de camarades mais très peu d’amis. Ses parents sont fiers de leur fils etc. Victor se retrouve donc dans le monde de la prépa, dans lequel il détonne tant par ses origines sociales que par ses résultats en dessous de ceux des autres. Il découvre en guise d’enseignants des bourreaux, dont l’humiliation semble être le cheval de bataille au détriment de la pédagogie et de l’encouragement. C’est marche ou crève dans cet univers de compétition cruelle. Si tu veux le droit de redoubler et le concours, il vaut mieux marcher. Et si tu ne veux pas, la porte est ouverte. Victor s’accroche, travaille comme un dingue, n’a aucune vie sociale, aucun ami. Les autres élèves le considèrent avec mépris, ne s’intéressent pas à lui. Peu importe, Victor s’accroche, se forge une carapace. Un jour, un élève, lui, décroche et se jette de la fenêtre de la bibliothèque du lycée en hurlant « connard ». Un bruit mat sur le sol : mort. Suicidé.
A partir de là, la vie de Victor bascule et la mort de Matthieu bouscule et entache le petit monde « propret » de la prépa qui se met à trembler, tente de faire comme si rien ne s’était passé. Pourtant, rien ne sera plus comme avant. Du jour au lendemain Victor devient « l’ami de la victime », devient populaire malgré lui, sort de son isolement.
Le roman prend alors une – petite- allure de polar : les tergiversations sur la raison qui a poussé Matthieu à sauter devient le fil ténu de l’intrigue. Ce que Victor, traumatisé par l’événement essayera de comprendre. Percer à jour Matthieu, fils de parents récemment divorcés. Il noue une relation étrange avec le père de la victime, qui lui permettra de faire son deuil, d’aller de l’avant et de devenir adulte.
Le premier roman que je lis de Jean-Philippe Blondel suite à plusieurs chroniques lues sur la blogosphère. Cet écrivain est aussi prof d’anglais dans la vie. On ne peut que l’identifier en partie au narrateur, d’ailleurs. Un petit jeu auquel les auteurs français adorent visiblement jouer, mais je m’en lasse.
Jean-Philippe Blondel donne un bon coup de griffe à l’univers de la prépa mais je n’ai rien appris de bien neuf là-dessus : exactement ce que mes copains de fac me racontaient (oui parce qu’on retrouve 99% de ces élèves sur le banc de la fac), complètement dégoûtés ou alors avec la grosse tête. Pour avoir aussi eu affaire à des profs de prépa (parce que parfois, on se les coltine en université !), je ne peux qu’adhérer au portrait qu’en fait Bondel, à une rare exception près parce que c’était quelqu’un qui aimait enseigner et qui ne considérait pas les étudiants des universités avec mépris (mais qui, néanmoins avait décidé que 12/20 c’était le summum dans la vie…).
Cependant, le roman ne se limite pas à la critique de l’univers des classes préparatoires (heureusement!) mais il montre comment Victor va parvenir à se construire, trouver sa voie, devenir un adulte libre de ses choix. En se jouant aussi de ce que pensent les autres.
« Le fils.
L’amant.
La pute.
Je pouvais incarner ce que les autres voulaient que je sois. C’est dans leur besoin que je me construisais. Dans leur envie que je me solidifiais. »
La fin du roman m’a complètement déçue (même si on devine le narrateur et l’auteur deviennent là une même personne). J’aurais voulu quelque chose d’un peu plus folichon. Qu’un peu de liberté soit prise avec la réalité, histoire de rêver. Mais la marque de fabrique ici est plutôt le roman du réel mais je n’ai rien appris de nouveau sous le soleil.
Je suis restée à moitié dedans et à moitié de hors de ce roman. Un peu trop tiède à mon goût, quelques longueurs avec les rencontres à répétition de Victor et du père de la victime. J’ai trouvé tout cela bien triste. Sans doute parce que je lis trop de romans irlandais plein d’humour dans le tragique et pas mal d’auto-dérision. Rien de tout cela ici. On finit par s’ennuyer un peu.
Bon, je vais rester sur les romans de cet auteur que j’ai bien aimé, alors.
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Mouais. Personnellement je ne suis pas sure de récidiver. 😉
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