Traduit par Marie Boudewyn
John Devine est né dans un coin paumé de l’Irlande, près de Kilcody, dans une caravane, un soir d’orage. Bébé infernal, il ne laisse aucun répit à sa mère jusqu’au jour où elle a l’idée de lui chanter un air qui lui passe par la tête, un vieil hymne : John the Revelator. Il change alors radicalement et se met à dormir dix heures par nuit paisiblement.
C’est John qui nous raconte son histoire. Il souligne qu’il doit son nom de baptême au frère de Jacques le Majeur, disciple préféré de Jésus, « le saint patron des imprimeurs, des tanneurs et des typographes », mais aussi celui qui écrivit le livre de l’Apocalypse. Sa mère, célibataire, accro à la Bible, aimait lui rappeler l’histoire de Jean quand il était enfant.
Apocalypse, bébé infernal, on sent déjà une ambiance d’enfer se pointer dans ce roman dès les premières pages…
Il n’y a pas grand chose à faire à Kilcody. John grandit, entouré de sa mère, d’une voisine qui les espionne et d’un alcoolique. Un jour débarque dans le village un jeune à peine plus âgé que John, Jamey Corboy (on pense tout de suite à l’appeler Jamey Corbeau !), excentrique, cultivant son mystère avec art, adepte de Rimbaud : « Il portait un manteau Crombie qui lui battait les mollets. Un jean noir et des bottes militaires, les cheveux lisses plaqués en arrière, le front haut, un nez plutôt aquilin. Il avait un regard d’un bleu intense ». Un solitaire qui aime s’isoler sous le préau de l’école « pour gribouiller dans un cahier à spirale plutôt que de donner des coups de pied dans un ballon de foot ». Un garçon à la naissance mystérieuse, adopté. Ce sont les livres qui lient les deux jeunes : Jamey, qui lit Rimaud en Afrique explique à John qui était ce type, à sa façon :
« Il a révolutionné la poésie à vingt et un ans, puis il a tout plaqué et s’est taillé en Afrique, où il a fait fortune en trafiquant des armes et des esclaves. (…) Lui et ses potes buvaient de l’absinthe dans un troquet baptisé Le Rat mort, à Paris. Un soir, Rimbaud est monté sur la table, il a baissé son pantalon, a coulé un bronze et a peint un tableau avec. Au rayon des blasphèmes, il n’y allait pas de main morte non plus ; il aimait graver des inscriptions sur les bancs publics. Merde à Dieu. »
A son tour, John lui explique que sa lecture favorite est L’Abrégé Harper, que Jamey trouve « dégueulasse », genre « porno pour lombrics ».
Les deux deviennent rapidement ami et leurs vies vont changer à tous les deux. Une beuverie, le saccage d’une église, l’un qui se fait prendre à la place de l’autre mais une amitié sans failles.
J’ai aimé l’ambiance gothique de ce roman irlandais, premier roman que je lis de Peter Murphy qui a déjà publié La rivière d’Enoch O’Reilly (traduit en France en 2014). Un titre étrange qui m’a attirée. Des personnages à la fois mystérieux et fantasques. Du mystère (même la mère de John a un secret à révéler. Et John devra faire un choix cornélien).
J’ai aimé les personnages hors normes de ce roman dont l’humour noir parsème les pages. J’ai aimé la plume simple mais inventive de Peter Murphy, qui arrive à planter un décor et une ambiance gothiques dans ce coin paumé d’Irlande, en s’amusant à sa façon des textes bibliques
.
Mais j’ai beaucoup moins aimé les récits annexes qui se greffent au récit principal et finissent par nous faire perdre pied – pourtant, j’ai lu d’autres romans avec le même procédé, comme ceux de Joseph O’Connor, entre autres, où ça ne m’a pas du tout fait cet effet). J’ai eu de vrais moments d’ennui à cause de cela.
Une lecture avec des hauts et des bas donc mais une jolie histoire sur l’amitié, abordée de manière originale, sur l’influence que peuvent avoir les gens, la littérature et la poésie sur notre vie.
Du porno pour lombrics ? Je suis curieuse de savoir à quoi ça ressemble.
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Rassure-toi : tu ne sauras pas grand chose! 😊
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