Pour une fois, je vous parle d’un roman dont tout le monde parle et qu’on voit partout, partout.
Adeline Dieudonné nous plonge dans une maison d’un lotissement moche, d’une famille aussi grise que le lotissement. Dans cette maison, une pièce est réservée aux trophées de chasse collectionnés par le père de famille, « La chambre des cadavres », comme l’appelle la jeune narratrice, dont on ne saura jamais le nom. L’explosion d’un siphon à crème (Chantilly) emporte mortellement le visage du marchand de glace, sous ses yeux et ceux de son petit frère. C’est la vie de la gamine et sa vision du monde qui basculent. Son objectif sera de trouver une solution pour remonter le temps, effacer cette tragédie pour que son petit frère redevienne l’enfant d’avant le drame.
Un conte noir et cruel. J’ai beaucoup apprécié la plume originale d’Adeline Dieudonné, qui intrigue vraiment le lecteur. On se laisse entraîner par son style percutant, parfois drôle mais surtout très noir et rouge sang. Au début j’ai apprécié les traits d’humour, cette gamine qui grandit et décrit son univers à la fois avec poésie et causticité. J’ai pensé d’abord à un roman sur la maltraitance conjugale, puis j’ai pensé qu’on partait sur un roman avec une part de science-fiction avec une histoire de machine à remonter le temps et ce professeur passionné de physique quantique. Puis on s’aperçoit qu’on laisse tout ça avec un goût de choses inachevées, de pistes lancées et abandonnées pour finir par un focus sur le père de famille : le monstre de l’histoire, la bête, l’ogre etc.
Si j’ai aimé la plume d’Adeline Dieudonné, sa manière d’inventer un univers à la fois loufoque et noir, j’ai trouvé que ce roman reposait trop sur une recherche de « sensationnel » et que les personnages étaient peu approfondis et n’évoluent pas, mis à part la narratrice, et son frère à la toute fin. Le père est l’archétype du monstre qui bat sa femme, a un boulot qui ne lui plaît pas, reste vautré devant la télé dès qu’il ne travaille pas, à côté de sa bouteille de whisky. La mère n’a aucune personnalité, sa propre fille lui attribue une parenté génétique avec l’amibe. Elle se laisse taper dessus, ne travaille pas, s’occupe des chèvres au fond de son jardin et cuisine des plats à son mari à la main leste. Tout la famille habite dans un lotissement moche et impersonnel. Ca fait beaucoup ! La vraie vie ?
La scène finale est complètement dingue et opère un retournement de situation dans l’exagération : [ATTENTION SPOILER, passez directement au dernier paragraphe si vous ne voulez pas connaître la fin !]le fils qui tue (et pas du premier coup) son père avec une arme de poing, pendant que celui-ci est en train d’égorger sa sœur. Le tout à grand renfort d’hémoglobine et de détails pour le moins sordides. Je ne suis pas un grande fan de détails « gore » et je pense qu’on peut décrire des scènes violentes avec davantage de subtilité, en faisant plutôt appel à l’imagination du lecteur.
« Mais il n’était pas mort. Gilles avait tiré dans son ventre. Son énorme masse s’est mise à se contorsionner comme un poisson sur le pont d’un bateau de pêche. Ses deux mains essayaient de retenir le sang qui s’échappaient. Il ressemblait à un animal. Plus que jamais, on était dans le grand ordre naturel, où chaque organisme lutte pour sa survie. Le corps de mon père se révoltait, refusait sa propre mort.
Gilles était trop adroit pour avoir raté un coup.Il savait exactement où il avait tiré. Il voulait une agonie à la hauteur de la vie de notre père. L’odeur du sang s’est répandue. Cette odeur tiède et nauséeuse. Les yeux de mon père roulaient dans leurs orbites, il ressemblait à ces masques d’Halloween au regard blanc. De ses lèvres coulaient un filet de bave sanguinolante. » La vraie vie ? Rien n’est moins sûr !
Cette scène finale a été l’apothéose qui m’empêche d’aimer totalement ce roman même si la qualité de l’écriture est remarquable. Une histoire qui manque de profondeur au détriment du sensationnel. De humour noir, peut-être, mais je me suis lassée au fur et à mesure de ma lecture où je voyais tout grossir de manière caricaturale. J’attendais peut-être trop de ce roman. Mon avis est dissonant au regard des éloges que l’on voit partout, mais je sais néanmoins que je ne suis pas la seule à être passée à côté de ce livre.
Je pense que si tu es seule à ne pas sembler aimer, c’est que beaucoup, comme moi, ne sentent pas ce roman pour eux et passent leur chemin. Ce que tu aurais sans doute fait si tu ne l’avais pas lu pour Elle. 😉
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Sans doute. L’avantage c’est qu’on se rend compte qu’on en fait sans doute un peu trop sur ce livre, que l’on voit affiché partout, jusque dans les couloirs du métro. Une bonne opération de « com », c’est clair. Ce qui n’aurait pas empêché au demeurant d’être un livre exceptionnel. Mais ce n’est pas vraiment ce que j’aie ressenti à sa lecture, même s’il est bien écrit d’un point de vue stylistique, mais au détriment du reste, à mon avis.
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Bon, ton avis confirme ma non envie de le lire !…
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C’est un roman original dans son écriture, certes, mais l’histoire me laisse sur ma faim et je n’aime pas les scènes « gore » juste pour le plaisir d’écrire une scène gore toutes tripes et boyaux dehors, si je puis dire. 🤢
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Il m’attend. Merci pour ton avis qui diverge de ce que j’ai pu lire jusque là.
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Bonne lecture quand même ! 😁
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