Semaine de retour à une semi-liberté à défaut de retour à une vie totalement normale. Beaucoup de blogueurs, booktubeurs ou bookstragrameurs disent s’être rués en librairie. Encore faut-il avoir la chance immense d’avoir une librairie près de chez soi. Et également le temps d’y aller si on travaille en zone rouge, zone où les transports sont encore restreints et les contraintes grandes. Très sincèrement, on a la tête ailleurs quand il faut jongler avec toutes les nouvelles interdictions et autres distanciations sociales. J’espère que le mois de juin sera un peu plus propice, et en attendant, je continue à piocher dans ma bibliothèque (tout en faisant quelques repérages à distance sur de futures publications dont je ferai sans doute une chronique s’il y a assez de matière ).
Bref, au dernier Livre Paris, j’étais allée écouter Hannelore Cayre. Elle m’avait fait beaucoup rire et donc j’avais acheté son dernier roman en date : La daronne.
Patience Portefeux a 53 ans. Elle a pas mal galéré dans la vie, à l’instar de ses parents, issus de la diaspora juive de Tunisie. Ses « fraudeurs de parents aimaient viscéralement l’argent ». Première phrase de l’incipit. L’argent va effectivement être le leitmotiv de cette histoire un peu surprenante qui va nous mener dans les bas fonds du trafic de drogue de petites frappes, le monde du deal de cannabis et dérivés.
Patience comprend et parle les dialectes arabes mieux que la plupart des « bledards » de l’Hexagone, nés en France en vérité et ne connaissant que quelques mots ou expressions de la langue de leurs parents. Elle trouve d’abord du taf comme interprète dans les tribunaux, pour les audiences de comparution immédiate. Dégoûtée par le système, sous-rémunérée, limite au black, selon elle, on finit pourtant par lui confier un autre registre que les comparutions immédiates : la traduction des gardes à vue et des écoutes téléphoniques de la police : elle comprends les 17 dialectes arabes, chose rare. Elle se retrouve à traduire essentiellement les écoutes pour la brigade des stups dans les locaux du 36 Quai des Orfèvres.
Patiente, la Francaise qui parle arabe est la personne au-dessus de tout soupçon. Pourtant, elle va franchir la ligne rouge sans trop savoir pourquoi, si ce n’est pour sympathie pour la petite dame qui s’occupe de sa mère à l’EHPAD, sans que celle-ci n’en sache rien, mais dont le fils trafique comme d’autres vont travailler. Patience se retrouve à jouer le rôle de la Juive intrépide adulé par sa mère.
J’ai aimé le personnage de Patience, qui porte tel un fardeau son héritage familial, celui de la Tunisie française disparue de son père et de la Vienne juive de sa mère. Enfant de « métèques, des rastaquouères , des étrangers » sans le sou qui n’avaient d’autres choix que d’accepter n’importe quelle conditions de travail ou alors maguouiller à outrance ». « Le peuple de la route. » Patience vit cet heritage comme un « je-t’aime moi non-plus ». Patience le jour, la Daronne la nuit. Seulement c’est quand même bien le bordel dans sa tête, ce qui fait que j’ai fini par me perdre en route. Elle m’a fait rire et sourire pour finalement me lasser…. Pourtant j’ai aimé son côté décalée.
Si l’humour est décapant, j’avoue que l’ensemble du roman m’a paru brouillon. Les personnages des dealers forcément maghrébins a fini par virer à la caricature. Oui, la vie est pleine de caricatures, mais est-il nécessaire d’en rajouter une couche en littérature ? Il y a du second degré sur toute l’histoire mais ce roman ne m’a pas convaincue plus que ça, malgré son Grand Prix de la littérature policière et Prix « Le Point » du polar européen. Finalement j’aurais apprécié davantage de finesse.
Bref, il me manque quelque chose qui aurait fait la différence.
Hannelore Cayre est avocate pénaliste.
J’ai moins aimé ce roman de l’auteure, également. Sa première trilogie est beaucoup plus percutante.
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J’irai peut-être voir, alors !
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