
Gens du Nord, voici un titre qui, en France, peut prêter à confusion. Je vous l’annonce tout de suite, la Québécoise Perrine Leblanc ne va pas nous parler des Chtis, ni même des Normands (l’étymologie de Normand signifie « Homme du Nord, c’est-à-dire les Vikings venus de Scandinavie) ! L’autrice nous emmène dans l’Irlande du Nord de 1991 en compagnie de deux journalistes, François Le Bars, de nationalité française et Anne Kelly, une Québécoise. François veut informer ses lecteurs au plus près de la réalité nord- irlandaise, et il a réussi à avoir des contacts avec les services secrets français et aussi des paramilitaires défenseurs de la décolonisation de l’Irlande du Nord (vous voyez tout de suite à qui je fais allusion !). De son côté, Anne est fascinée par la disparition d’un homme de lettres irlandais, Samuel Gallagher, qui avait des affinités avec l’Irish Republican Army. Ses accointances avec cette organisation paramilitaire lui aurait valu d’être abattu par une autre organisation paramilitaire du camp adverse, UVF, Union Volonteer Force, groupe protestant loyaliste, violemment opposé au républicanisme irlandais. On assiste en direct à sa mise à mort.
Mais rien n’est simple en Irlande du Nord en 1991. L’apparence est source de confusion. Tout est à peu près sens dessus dessous tout le temps. Les petits commerces peinards le jour peuvent se transformer en un clin d’oeil en pub non répertorié la nuit, bastion de militants indépendantistes. On n’est jamais certain non plus que « Machin » qui dit s’appeler « Machin » n’a pas en réalité une autre identité.
Perrine Leblanc nous plonge à merveille dans les eaux troubles de l’Irlande du Nord dans un roman très bien documenté (avec un petit glossaire en fin d’ouvrage, pour permettre de s’y retrouver si on ne connait rien à l’Irlande du Nord). Il y a un twist dans l’intrigue, qui nous laisse vraiment surpris, mais pour notre plus grand plaisir, au risque de nous rendre également un peu parano.🤭 {De tout façon, pour avoir marché dans les rues de Belfast en 2004 et 2007, je peux vous dire que tout prêt(ait) encore à la paranoïa, surtout quand on se balade avec un Irlandais du Sud qui se prend des réflexions aux allures potaches mais qui l’atteignent en plein coeur. Belfast ne m’attire pas pour y passer des vacances, même avec le musée du Titanic construit pour faire venir les touristes. Je n’y suis pas retournée.}
Étrangement, je me suis assez peu attachée aux deux personnages principaux, les journalistes qui vont devenir un peu plus que des amis (ce n’est, à mon avis, qu’un prétexte pour développer tout le reste), mais j’ai aimé évoluer dans cette ambiance mouvante, digne d’un roman d’espionnage.
On comprend aussi, dans les notes de l’autrice, ce qui la lie à l’Irlande du Nord. Eh oui, si vous l’ignorez, au XIXe siècle, les Irlandais les plus fortunés s’exilaient aux États-unis et les moins fortunés au Canada. Il suffit d’ailleurs de se promener sur les quais à Dublin pour tomber sur une réplique d’un bateau en direction du Canada.
C’est par hasard que je suis tombée sur la publication de ce roman pour la rentrée littéraire d’hiver. Et c’est une bien belle surprise. Perrine Leblanc a écrit deux autres romans : Kolia (2011) et Malabourg (2014, disponible en Folio).
Je vous reparlerai de littérature québécoise très bientôt, car j’ai terminé Sauvagines de Gabrielle Filteau-Chiba. Et je vous reparlerai également d’Irlande du Nord puisque je lis Ne dis rien de Patrick Radden Keefe et que Sam Millar, que j’ai rencontré pour la deuxième fois en France, au salon du livre d’Abbeville, m’a dédicacé Un tueur sur mesure. Il connaît Belfast mieux que quiconque puisqu’il y vit.
Merci pour ce conseil de lecture. Tu vas aller voir le film Belfast ?
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Non mais il paraît que ça ressemble à Belfast vu par Disney. Le réalisateur a été adoubé par la reine, ce qui en dit long sur son point de vue. Ensuite, je trouve ses films nuls. Donc je ne peux que conseiller d’autres films sur Belfast que celui-ci. Ceux de Peter Greengrass,…
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