Contre toute attente j’ai replongé dans la lecture d’Amélie Nothomb dont j’ai lu à peu près tous les romans jusqu’au Fait du prince, qui m’avait déçue. Et c’était avant la création du blog. Depuis, mes lectures se sont beaucoup diversifiées, étendues dans des contrées littéraires qui m’étaient inconnues auparavant.
Je sais qu’Amélie a ses détracteurs qui lui reprochent de sortir aussi régulièrement qu’un métronome et à gros tirage, un livre une fois par an au moment de la rentrée littéraire d’automne. Certains lui reprochent même d’écrire des romans avec pas assez de feuilles ! Mais depuis quand la qualité d’un texte se mesure-t-elle à sa longueur ? Ca me rappelle des histoires de dissert à la fac… Cela dit, je serais presque d’accord pour dire que Pétronille est trop court.
Un conseil : quand vous commencez la lecture, veillez à être en solo et dans un lieu bien insonorisé sous peine de voir débarquer les pompiers ou l’asile. L’entourage peut trouver qu’il vous arrive quelque chose de très étrange – « t’as picolé ou quoi ? »…
Il est effectivement question d’alcool dans ce bouquin. Mais pas n’importe lequel. Celui avec des fines bulles : le champagne. Mais pas un trou-chaussettes : le meilleur du meilleur : Veuve-Clicquot, Rotschild… En effet « l’ivresse (…) relève de l’art » et le champagne provoque « une ivresse qui ne ressemble à nulle autre » : « Il rend gracieux, à la fois léger et profond, désintéressé » …
Amélie se prend une cuite toute seule jusqu’au moment où elle se rend compte que le champagne la rend de compagnie tellement sympathique qu’il faut en faire profiter quelqu’un. Elle se met en quête d’un « convignon » ou d’une « convigne » de beuverie. Après avoir passé en revue toutes ses connaissances et décrété qu’aucune ne pouvait convenir, elle décide de le/la trouver parmi ses lectrices et lecteurs au moment tellement bizarroïde de la dédicace qui « repose sur une ambiguïté fondamentale : personne ne sait ce que l’autre veut ». Seulement Amélie est réputée répondre à tous les fans qui lui écrivent et donc de connaître ceux avec lesquels elle entretient une correspondance.
Une certaine Pétronille Fanto lui tend son exemplaire du Sabotage amoureux. Amélie sursaute sur son siège : « C’est vous ?! » Du choc de la rencontre qui la fait changer de dimension (« je ne sais même pas si c’est passer de la deuxième à la troisième dimension, parce que c’est peut-être le contraire »), débute une histoire d’amitié farfelue avec cette personne qui semble avoir 15 ans et un « regard de piment rouge » mais qui a 22 ans et termine un master de littérature élisabethaine, (et deviendra à son tour un écrivain connu).
Pétronille est française, de milieu populaire, ses parents sont communistes. C’est un croisement entre Zazie dans le métro et Christopher Marlow (pour reprendre ce que dit elle-même Amélie Nothomb de ce personnage haut en couleur dans une interview présentant son livre). Amélie est belge, fille de diplomate. Un choc de classes mais un duo de choc, avec un goût pour l’absurde qui donne des moments vraiment truculeusement savoureux.
Si je raconte tout, ça n’a plus aucun intérêt, mais sachez que vous trouverez Vivienne Westwood dans ces pages, pas franchement dans le plus reluisant de sa personnalité. Il y a aussi une histoire de pyjama orange sur fond de vouvoiement, une allergie aux acariens, une virée à ski et une disparition dans le désert. Et du champagne pour accompagner le tout. A l’image punk destroy de ce roman pétillant à souhait mais aussi tragique.
Amélie Nothomb aborde, entre autres, la difficulté de la vivre de sa plume pour 99% des écrivains en France. Dans le bastion éditorial on dirait encore : « Vous savez bien que dans le monde des lettres, les prolétaires n’ont aucune chance. » (sic!). De quoi susciter l’indignation. Mais aussi la jalousie. Le vol. La fin du roman à ce titre-là est surprenante et inattendue. Une mise en abyme en forme de pirouette.
La meilleure cuvée nothombienne que j’ai lue depuis longtemps. Faut pas s’en priver !
C’est rigolo, je l’ai lu cette semaine, avec plaisir, c’est léger et drôle, mais pas vain. Comme une bulle de champagne. Et quelle fin!
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Ah oui, la fin : terrible mais tordant façon Amélie Nothomb. J’ai vraiment beaucoup ri en lisant ce livre. Un excellent souvenir même plus d’un an après !
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