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Traduit par Eric Boury
4e de couverture : « Einar, correspondant à Akureyri, publie un article sur une bâtisse hantée qui va servir de décor à un film américain. Au lendemain de la grande fête des commerçants d’Akureyri, où tout le monde a beaucoup bu, il apprend par Victoria, une étrange femme qui se prétend médium, le meurtre d’une jeune fille dans cette maison. Peu après, Victoria elle-même est tuée dans un centre de désintoxication alcoolique. Einar mène l’enquête. »
Je continue à fond sur ma lancée de découverte de littérature islandaise. Après Arnaldur Indridason qui m’a enchantée avec Hypothermie et tant d’autres romans policiers à la sauce très zen malgré des sujets noirs, je m’aventure à la découverte de son confrère, Arni Thorarinsson, dont le héros récurrent est non pas un policier mais un journaliste.
Parce que ce titre m’intriguait fort, j’ai donc commencé par celui qui est le deuxième mettant en scène Einar, correspondant du Journal du soir, quotidien de la petite ville d’Akureyri. Celui-ci, apparemment ancien alcoolique, observe d’un oeil cynique la société qui l’entoure.
Pendant le week-end des Commerçants, la boîte de Pandore s’ouvre en grand, jusqu’au meurtre plutôt étrange d’une mystérieuse jeune fille retrouvée dans une maison non moins étrange, sinon hantée… du moins, c’est ce qu’on dit. « Dans le temps, les histoires de revenants étaient tout bêtement une sorte d’exutoire spirituel pour un peuple isolé et muselé qui avait besoin d’un peu de rêves ». Mais les temps changent, enfin, pas tant que ça…
Après avoir récupéré sa rejetonne de fille, qui expérimente l’alcool et les sorties nocturnes avec son petit copain, sans vraiment penser à mal, Einar, ne pouvant pas compter sur la police locale pour retrouver les agresseurs de ses enfants et le meurtrier de celle surnommée « Pandora » par une certaine Victoria, décide de mener l’enquête lui-même pour le compte de son journal.
L’intrigue se déroule lentement, sans se presser. On pourrait presque dire que pendant 400 pages il ne se passe presque rien. Pourtant, chaque personnage rencontré est, sinon décortiqué au scalpel, du moins étudié minutieusement, dans le monde qui l’entoure. De la violence sociétale à la violence familiale, il n’y a qu’un pas et elle touche tous les milieux, les plus propres sur eux n’étant pas forcément les plus clairs. On trouve ici des personnages écorchés vifs ou pourris jusqu’à l’os par l’argent et/ou la drogue. Ce roman est un coup de griffe à l’avidité capitaliste outrancière (décidément les Nordiques sont les rois pour ça), avec ici une image bien peu glorieuse d’une certaine industrie cinématographique américaine, qui n’hésitent pas piocher dans la Centrale cinématographique islandaise…
Je me suis attachée au personnage d’Einar (cynique mais tellement lucide) et à ses enfants et je dois dire que j’ai hâte de le retrouver pour de nouvelles aventures, dans cet univers islandais où « docteur Jekyll ne brime plus Mister Hyde, [mais où] c’est Mister Hyde qui brime Doctor Jeckyll. Et encore, pour peu que ça lui chante ».
On retrouve ici une victime qui se prétend médium, comme dans Hypothermie, que j’ai lu il y a peu. Ca m’a frappée et je me demande si c’est récurrent dans la littérature islandaise, dont je suis bien décidée à approfondir la découverte car elle m’enchante !
En conclusion : une belle lecture, où la signification du titre français est révélée dans les dernières pages…